2h30 AM, un mercredi. Nous étions confiants qu’enfin nous pourrions grappiller quelques heures de sommeil, et ce, pour la simple et bonne raison qu’à un moment donné, le karma doit bien finir par respecter sa part du contrat. Mais non : 15 minutes après qu’il se soit endormi, notre adorable poupon de trois semaines se tortille, semble inconfortable et … pleure de plus belle. C’est à recommencer, encore.
À cette époque, mon chum ne pouvait pas concevoir que notre bébé était simplement difficile; pour chaque problème, il lui attribuait un fondement extrinsèque, la plupart du temps un souci de santé éventuellement amplifié par ses interminables recherches sur Internet. Il a pleuré (que dis-je, crié) de 21h à 4h lors de sa première nuit à la maison? Son blues du troisième jour. Il reste collé au sein 23h52 sur 24 depuis des jours? Une grosse poussée de croissance, il faut bien qu’il s’alimente s’il veut être un grand joueur de soccer. Maintenant que notre beau diable a cinq mois, mon chum a modéré cette habitude, allez savoir pourquoi.
2h35 AM, il me dit :
- Ah ben, c’est sûr qu’il a du reflux gastro-œsophagien!
Son diagnostic est tombé comme ça nous arrive tous de dévaler les escaliers : ça fait mal, mais tu ne comprends pas immédiatement où ni pourquoi c’est si douloureux. Oui, ça faisait déjà quelques jours que lorsque notre fils était couché sur le dos, il se tortillait. Il faisait aussi mine de mâcher de la gomme, il criait après avoir ravalé, ne dormait pratiquement pas, etc., mais même si je n’en connaissais pas encore les répercussions concrètes, je me doutais que ce ne serait pas simple et je refusais obstinément cette hypothèse.
Il faut dire que mon déni fut largement encouragé par le manque d’informations à ce sujet. Effectivement, s’il y a une section dans le Mieux Vivre sur l’effet des saucisses fumées pendant la grossesse, le simple mot-clé reflux ne s’y trouve pas. Pourtant, « on estime que 50% des bébés présentent du reflux, des régurgitations ou des vomissements quotidiennement durant les trois premiers mois de vie. » Lorsque nous évoquâmes cette possibilité à une professionnelle de la santé, cette dernière nous a assuré que c’était impossible, sans quoi il ne pourrait même pas boire sans crier de douleur. Le mot magique? Les coliques. Les coliques, ça passe.
Mon obstiné de chum continuait tout de même d’appeler un chat un chat, et à l’aide de nos recherches subséquentes, de nos adhésions aux groupes de parents aux prises avec ce trouble, etc., il me fallut admettre que notre précieux avait bel et bien du reflux gastro-œsophagien. Nous avons dû prendre différentes mesures pour rendre son quotidien, et le nôtre, un peu plus doux. Nous trouvâmes plusieurs recommandations : tenir bébé en position verticale pendant environ une heure après chaque boire, surélever la tête du lit pour qu’il puisse dormir en angle, utiliser le porte-bébé à profusion, etc.
Pour notre part, excluant les traitements pharmacologiques, une seule mesure fonctionna : dormir sur maman. En effet, étant résolument incapable de se trouver sur le dos, il devait soit se trouver sur le ventre ou le côté pour trouver le sommeil et à cet âge, nous voulions lui offrir le maximum de chaleur et de confort. Nous nous sommes donc rendu compte que si je me couchais sur le divan, en installant un coussin comme ça, mon bras ici, sa tête là … MIRACLE! Il pouvait dormir pendant des heures! C’est ainsi que semaine après semaine, nous avons pris l’habitude de dormir collés ventre contre ventre.
Évidemment, étant continuellement talonnée par les avertissements concernant la mort subite du nourrisson, ma peur n’avait d’égale que mon immense culpabilité. Nuit après nuit, j’imaginais le pire et ce, même si je savais alors que notre mise en place était sécuritaire et qu’il s’agissait pour nous de la seule et unique solution. De plus, à acheter la paix sans vergogne, les ressources s’épuisent rapidement et avec un poids de plus de 16 livres s’écrasant sur moi nuit après nuit, mon diaphragme commençait à trouver ça moins drôle. Le mot gâté, missive maudite, galvaudée, repoussante, traversait de plus en plus souvent les lèvres des gens de notre entourage, à notre grand déplaisir.
C’est donc après cinq mois, alors que son reflux était presque complètement contrôlé et ce, depuis longtemps, qu’il fallut admettre que nous devions changer cette routine devenue peu appropriée. Après cinq mois de chaleur humaine, de souffle dans le cou et de réveils ensoleillés, il me faut maintenant le convaincre que l’indifférence de son lit lui sera éventuellement bénéfique. Je vous passerai les détails de son entraînement au sommeil, entraînement qui progresse grâce aux bons conseils de Bedaine Urbaine, mais qui n’est pas encore tout à fait acquis.
Avoir un enfant, c’est enfiler les apprentissages à vitesse grand V, et cet obstacle aura eu pour effet de m’apporter une certaine confiance. Ce problème de santé incarne l’une des mille raisons pour lesquelles nous prenons différentes habitudes, en tant que parents afin de faciliter la vie de notre bébé, et il est absolument inutile de nous culpabiliser. Cessons de se taper sur les doigts et apprenons à assumer nos choix, guidés par notre instinct.